La
prestation époustouflante de Michael Douglas participe pour beaucoup
à la très grande réussite de ce biopic kitsch et émouvant.
Scott
Thorson (Matt Damon) est un enfant adopté. Un jour d'été 1977, sa
route croise celle de Liberace (Michael Douglas), un pianiste
virtuose et superstar qui fait de ses concerts au Las Vegas Hilton
des shows démesurés. Scott est engagé par Liberace comme
secrétaire particulier. Malgré leur différence d'âge et de
condition sociale, ils vont se rapprocher, jusqu'à devenir amants.
C'est le début d'une relation cachée qui durera cinq années, entre
sexe, jalousies, apparences et fascination...
Flamboyant
et décalé
Liberace
est la rock star du piano. Il donne des concerts dans le monde
entier. Il est l'une des incarnations les plus flamboyantes et plus
décalé des seventies. Cet artiste à part mène une vie en
conformité avec son personnage. En public, il donne l'image d'un
homme inaccessible, iconique. En privé, il multiplie les amants tout
en jouant les divas. Un jour, sa route croise celle de Scott Thorson.
Il fera de ce jeune éphèbe son secrétaire particulier, avec qui
rapidement une relation amoureuse se développera. Complices au
début, Liberace assoit peu à peu son emprise sur son compagnon,
jusqu'à lui «remodeler» le visage par la chirurgie esthétique.
Il pense le contrôler, et va jusqu'à vouloir en faire son héritier.
Mais les choses vont peu à peu lui échapper. Cette relation est
secrète, car Liberace est une célébrité, et l'homosexualité à
l'époque étant encore diversement perçu, il ne voulait pas que
cela nuise à la carrière qu'il s'est forgé.
Un
personnage vu sous le prisme du regard de Thorson, car c'est de son
point de vue qu'est raconté l'histoire, sa relation amoureuse et les
extravagances de Liberace. Cela souligne le contraste entre les deux
mondes et apporte décalage et humour. Car Scott Thorson est un
enfant adopté qui est complètement étranger au milieu du
show-business. Sa rencontre avec la star du piano va le faire rentrer
dans ce milieu, ses strass et paillettes, mais aussi ses apparences,
ses mensonges, ses faux semblants. Il se fait même refaire le
visage. Pour autant, il gardera son innocence, sa candeur et son
recul sur un monde dans lequel il ne se fondra jamais tout à fait.
Il reste l'homme de l'ombre. Mais un homme qui saura se rendre
indispensable à Liberace (et son chien, Baby Boy). Aussi personnel
soit le portrait, il est néanmoins assez honnête sans être
hagiographique. Et c'est avant tout l'histoire d'un couple.
Une
photographie de l'homosexualité
Un
couple montré sous un angle « banal », et non traité sous l'angle
de la différence. Leurs discussions sont celles que peuvent avoir
n'importe quel couple. « Ce qui est moins banal, c'est le cadre
dans lequel ces discussions avaient lieu », souligne le
réalisateur, Steven Soderbergh, qui s'est pour ce film aidé du
livre de Scott Thorson Behind the Candelabra. Un couple
d'apparence solide malgré les différences, mais qui va peu à peu
s'avérer être ce qui va les séparer de manière irréversible. Au
travers d'eux, c'est une photographie de l'homosexualité de l'époque
qui apparaît en creux. En effet, dans les années 70, elle était
encore très diversement acceptée. C'est pourquoi la relation entre
Liberace et Scott est restée secrète, et que le célèbre pianiste
nia son homosexualité lorsque lui et son amant rompent et que ce
dernier réclama une pension. L'hétérosexualité était presque une
exigence pour séduire le public.
Mais
exigeant est également le terme que l'on peut employer pour
qualifier la prestation de Michael Douglas, qui propose ici un
Liberace grandiose et qui ne se prend pas au sérieux. Le pas de côté
de la réalisation, puisque l'histoire est racontée du point de vue
de Scott, permet ce ton léger et humoristique, n'abordant que mieux,
sous la légèreté apparente, des sujets plus sérieux, notamment la
drogue, l'homosexualité et le sida. Mais les parts plus sombres,
plus intimes du pianiste sont également évoquées, sans pour autant
là encore trop s'appesantir. En bref, un plaisir de cinéma où
crève à l'écran l'envie, pour le réalisateur de Sexe, mensonge
et vidéo et de la série des Ocean's, pour son nouveau
(et dernier?) film, de se faire plaisir et de faire plaisir sous un
déluge de couleurs et de musique. Le tout enrobé sous une pointe
d'admiration de Steven Soderbergh pour son sujet, aussi débordant
d'exubérance que génial artiste de divertissement de son temps.
Au-delà
du simple biopic ou bien encore de la peinture d'une certaine
industrie du spectacle de l'époque, le réalisateur américain
Steven Soderbergh nous livre une production pop où les deux acteurs
principaux s'en donnent à cœur joie sans peur du ridicule. Un pur
divertissement dans lequel l'humour et la gravité s'entremêlent
sans se vampiriser. Un biopic qui rend un vibrant et souriant hommage
à une immense star réhabilitée de façon intelligente et honnête.
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