Le
réalisateur de « Moulin Rouge » signe une nouvelle adaptation très
réussie du roman culte de Francis Scott Fitzgerald.
1922.
Nick Carraway, jeune écrivain, s'installe à New York, ville de tous
les possibles, auprès des milliardaires qui y vivent. Là-bas, il y
revoit sa cousine Daisy, ainsi que le mari de celle-ci, Tom Buchanan.
Un soir, Nick participe à l'une des soirées mondaines organisées
par son mystérieux et richissime voisin, Jay Gatsby. Grâce à cette
rencontre, il va se retrouver plongé au cœur d'un univers
fascinant, fait d'excès, de fêtes, de mensonges, de tromperies et
d'oubli.
Témoin
de son temps
Nick
Carraway (Tobey Maguire) n'a rien d'un arriviste. S'il vient à New
York, c'est uniquement parce que c'est là que tout se passe, le
centre névralgique du mouvement post - Première Guerre mondiale,
l'épicentre d'une époque qui se trémousse au son d'une musique
jazz dont la popularité ne fait que croître. Plus qu'un écrivain,
il se fait le chroniqueur, le témoin privilégié de son temps,
extérieur d'abord, puis intérieur au fil de ses rencontres,
notamment avec Jay Gatsby (Leonardo Di Caprio). Tous deux ont des
intérêts entendus et communs à leur amitié. Une amitié qui va
les mener à tous les excès. Personnage principal au début du film,
Nick s'effacera progressivement derrière Gatsby au fur et à mesure
de l'évolution de la découverte de ce milliardaire étrange et
impénétrable, dont les secrets peu à peu dévoilés vont mener
Nick à une cruelle désillusion, à la fin de sa naïveté, et à la
perte définitive de son innocence.
Discret
au début, afin d'éviter de trop s'exposer, Gatsby va voir au fil de
l'histoire le voile se déchirer sur la personnalité factice qu'il
s'était forgé, sur l'esquisse qu'il s'était dessiné et dont il
croyait les traits solides. Mais les contours étaient trop grossiers
pour faire illusion éternellement. Derrière le masque du dandy se
cache en effet un homme qui tente par tous les moyens d'échapper à
sa condition et de s'élever dans un monde ou le paraître prend le
pas sur l'être, où les gens sont jugés à leur condition sociale,
leur portefeuille, leurs belles toilettes. Et Gatsby a très bien
compris que c'est en construisant un monde de fêtes dans un château
de contes de fées pour adultes que se jouent tous les enjeux de
pouvoir, d'alliances plus ou moins solides. Personne n'est dupe de
cette bulle, mais tout le monde fait comme si. Chacun y trouve son
compte. C'est sur cet éphémère que compte Gatsby pour séduire la
belle Daisy (Carey Mulligan).
Atmosphère
de clair-obscur
L'éphémère,
la légèreté semble être ce qui caractérise le «Gatsby» de Baz
Luhrmann. Mais en grattant un peu, sous la couche de superficialité
qui imprègne la première partie du film, nous est montré une
histoire plus sombre aux personnages plus décadents qu'ils
n'apparaissent de prime abord. En jouant sur les contrastes et les
faux semblants, le réalisateur australien joue les virtuoses de
l'équilibre et laisse s'instaurer une atmosphère faite de
clair-obscur et de décalages anachroniques, comme en atteste par
exemple l'utilisation de la musique, dont des chansons de Beyonce
pour ne citer qu'elle (le même procédé a déjà été utilisé
dans le passé pour Moulin Rouge). Le scénario est finalement
parfaitement en accord avec le personnage de Gatsby : séduisant et
riche mais qui cache bien son jeu et se révèle très complexe. A
l'instar des relations ambiguës qui relient les personnages entre
eux.
A
commencer par la relation de fascination entre Gatsby et Nick. Ce
dernier, tout d'abord intrigué, va peu à peu se laisser envoûter
par le charisme que dégage le milliardaire, et lui restera fidèle
jusqu'au bout. Gatsby le considère comme son seul ami, même si il
est difficile de savoir si cela est vrai ou s'il s'agit d'un de ses
mensonges pour l'amadouer. Car Gatsby a besoin de lui pour approcher
sa cousine Daisy, une femme dont il est tombé éperdument amoureux
et qu'il veut séduire en l'impressionnant, d'où les immenses fêtes
dans sa demeure. Il entre alors en conflit avec Tom, qui lui-même
trompe Daisy. Sous les apparences d'homme puissant, Gatsby est
surtout un homme romantique qui se laisse aveugler par ses sentiments
et qui veut croire que Daisy finira tôt ou tard par quitter son mari
pour lui. Mais Gatsby est un homme profondément seul qui utilise des
armes factices comme atout et qui se révéleront insuffisantes.
Entre
fastes kitsch et gigantesque et drame intimiste, le réalisateur de
Roméo + Juliet trouve un parfait équilibre. Superbement
raconté, il trouve un ton juste et très personnel pour raconter une
histoire déjà connue. Popularisé par Robert Redford, le personnage
de Gatsby est campé par un Leonardo Di Caprio qui ne cherche
aucunement à copier son aîné, mais au contraire en fait une
nouvelle lecture tout à fait passionnante. Tout concourt à faire de
ce film une réussite à la fois spectaculaire et crépusculaire.
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